La crise sanitaire de la Covid-19 a frappé toute l’activité du marché des bijoux, y compris celle des négociants en diamant depuis le 17 mars 2020, premier jour du confinement dans l’Hexagone. Alors que la profession annonçait des chiffres très positifs pour ses ventes de 2019, qu’en est-il de la santé du marché diamantaire aujourd’hui ? Nous avons interviewé quatre acteurs de cet univers pour mesurer l’ampleur des changements.
Le point de vue économique
avec Hubert Lapipe, directeur de la Société 5
Il est le spécialiste des données chiffrées des ventes horlogerie-bijouterie-joaillerie en France : Hubert Lapipe a fondé le « Panel 5 », instrument de veille sur le commerce de détail, tout secteur confondu (horlogers-bijoutiers traditionnels, grands magasins, magasins de bijoux fantaisie). Il nous livre le compte rendu sur le secteur du diamant en 2020. « Malgré la crise sanitaire, le diamant a surperformé de janvier à octobre 2020 inclus (constat avant le 2ème confinement). Le diamant n’a connu qu’une légère baisse de 2 % de son chiffre d’affaires global en France pendant cette période. Alors que l’ensemble de la profession montres et bijoux a subi une chute de 16 % de ses ventes. Nous n’avons pas encore le résultat entier de 2020. » explique Hubert Lapipe. En outre, le prix moyen du bijou en diamant (toutes catégories : solitaire, pièce multi-pierres…) a augmenté de 5 % pendant les dix premiers mois de l’année 2020. « Le diamant reste un produit sensuel, symbole de l’attachement, du lien, de l’amour, parfait pour dynamiser le commerce de détail, car on a besoin de le toucher. Le diamant est un peu l’antidote de la vente Internet, du digital, même si l’on connaît certains succès en ligne. Le diamant tire son épingle du jeu tant il est solide symboliquement. » raconte l’analyste. La valeur du diamant est mesurable notamment avec ses 4 critères professionnels des « 4C » (Cut, Color, Carat, Clarity). Le 5ème critère serait les outils de traçabilité de la pierre. Justement Facet Elixir, diamantaire s’exprime à ce sujet.
Le point de vue du diamantaire
avec Sylvain Roy, responsable de Facet Elixir en France
Facet Elixir est la branche française de la société Facet Barcelona, diamantaire et fabricant de bijoux. Elle possède la ligne bis « Sweet Paris », une gamme de bijoux en diamant au prix très abordables (de 390 à 1500 euros) qui séduit particulièrement les jeunes femmes contemporaines, grâce à un design classique revisité. Comme tous les fabricants, Facet a subi la crise avec la succession d’ouvertures/fermetures des commerces. Mais la société mise sur l’avenir avec un message et des actions très positives basées sur la traçabilité du diamant et même maintenant, sur tout le process de fabrication. « Nous avons beaucoup investi avec notre application « Diamond By Way » qui retrace tout le chemin de la gemme, de l’extraction à l’écrin. Désormais, après les audits les plus stricts, nous avons reçu la certification RJC CoC en mars 2020. C’est même le métal et le bijou qui sont entièrement transparents pour le consommateur. Tout est éthiquement tracé désormais. » explique Sylvain Roy. C’est une belle démarche qui ne peut que séduire une consommatrice de plus en plus avide d’infos en amont. « Nous avons même étendu la démarche jusqu’à développer le made in Europe en ouvrant en plein crise du COVID, une usine de bijoux à Cordoue en Espagne. » ajoute Sylvain Roy.
Bracelet « Sweet Paris » en or et diamants by Facet
La ligne « Sweet Paris » by Facet en or et diamants
Joli jeu de tailles de diamants avec « Sweet Paris » by Facet
Le point de vue du Laboratoire Français de Gemmologie
avec Aurélien Delaunay, directeur
CREDIT : Laboratoire Français de Gemmologie
Lot de diamants pour le pavage de tout petite taille
© Laboratoire Français de Gemmologie
Le Laboratoire Français de Gemmologie (LFG) est l’un des plus anciens laboratoires au monde. Il a été fondé en 1929 par la Chambre syndicale du diamant. Situé au cœur de Paris, sa mission principale est d’expertiser les gemmes en toute indépendance pour l’information et la sécurité des consommateurs finaux. Sa spécificité est de proposer des rapports d’analyse de toutes les gemmes et des perles. « Avant ou après la crise, cela ne change pas. Pour le diamant notre territoire d’analyse est assez large, car nous faisons le rapport de pierres venant des acteurs de la haute joaillerie, provenant aussi des collections de négociants en pierres, mais aussi des gemmes de seconde main dédiées à la vente aux enchères. Bien évidemment nos services s’adressent aussi aux particuliers voulant mesurer la valeur de leur pierre. » explique Aurélien Delaunay, directeur du LFG.
Celui-ci accueille des pierres de tous les caratages (poids), même si le plus souvent les diamants isolés pèsent entre 1 et 5 carats. Les diamants entre 5 et 20 carats sont plus rares, car avec ces poids on se situe dans la haute joaillerie. Le LFG possède également un département dédié aux tout petits diamants qui arrivent en lots (par centaines) et qui sont destinés à la technique du pavage.
« A travers ces lots de petits diamants, notre problématique est d’isoler et donc de dénicher le diamant de synthèse qui n’est pas un diamant naturel. Depuis 5 ans, nous passons ces lots à travers des machines très performantes qui peuvent « scanner » et trier 10 000 pierres par heure ! Ce qui est très aisé et sûr pour s’assurer de la « naturalité » de nos diamants examinés » ajoute Aurélien Delaunay.
Pendant le premier confinement en mars 2020, suite à la crise sanitaire, comme le Laboratoire était fermé, il a subi une chute de son chiffre d’affaires. Après la reprise s’est fait sentir même au second confinement. « Par exemple, un secteur qui nous fait faire un rebond de notre activité, c’est la vente aux enchères qui connaît un sursaut, car elle a pu aussi notamment se faire sur Internet. » achève Aurélien Delaunay.
Le point de vue de la maison Sotheby’s France
avec Magali Teisseire, responsable du département joaillerie
Côté joaillerie, Sotheby’s peut vendre les diamants sous différentes formes : comme on dit dans la profession « la pierre sur papier » non montée, avec ses caractéristiques décrites. Cela peut être des bijoux en diamants, non signés ou encore signés par des maisons reconnues comme Cartier, Van Cleef & Arpels, Bulgari, Boucheron… La liste est longue. « Cela peut paraître étonnant, mais malgré la crise de la Covid, la vente aux enchères de diamants se porte bien. Cette année nous avons vendu des pierres exceptionnelles d’un poids incroyable. Par exemple, le 5 octobre 2020 à Hong Kong, un diamant ovale de 102,39 carats de qualité D Flawless, pour une vente de 15,7 millions de dollars US. » explique Magali Teisseire. Le succès s’est prolongé : en novembre 2020, Sotheby’s a vendu un diamant ovale rose « D flawless vivid purple pink » pesant 14,83 carats pour un record mondial de 26,6 millions de dollars US. Ces dernières années le diamant rose d’exception a augmenté de 300 %.
Sotheby’s propose un panel de prix pour tout le monde et les bijoux signés en diamant plaisent toujours autant. « On vend beaucoup de diamants situés entre 5 e 15 carats. L’acheteur va aujourd’hui vers la qualité. Ce qui a changé avec la crise sanitaire, c’est la première fois, en 2020 que l’on a fait des ventes sans commissaire-priseur, en les faisant sur Internet. Sécurité et conditions sanitaires obligatoires » raconte Magali Teisseire.
La Covid-19 a diversifié les modes de ventes « en live », mais les enchères pour le diamant ne sont pas essoufflées.
« Fancy Vivid pink » diamant, diaman blanc et or blanc, saphir bleu
© Sotheby’s.
Un diamant ovale rose « D flawless vivid purple pink » pesant 14,83 carats pour un record mondial de 26,6 millions de dollars US à la vente finale
© Sotheby’s